Notre lettre 1020 publiée le 2 avril 2024

MONSEIGNEUR LEBRUN
A COEUR OUVERT
DROIT D'INVENTAIRE LEGITIME

LA CHRONIQUE DE PHILIPPE DE LABRIOLLE
A PROPOS DE SOIN AMI
L'ARCHEVEQUE DE ROUEN



L'archevêque de Rouen n'est pas un inconnu pour Paix Liturgique. Compagnon de route du MJCF dans les premières années du Mouvement (70/75), et déjà conscient de sa vocation, le jeune Dominique Lebrun faisait sien l'esprit de catholiques se rassemblant pour protester contre la décomposition de l'Eglise et rester fidèles. L'aggiornamento annoncé tournait au fiasco. Trop, c'est trop, protestions nous de concert.

L'abbé Lebrun, devenu évêque de Saint Etienne puis archevêque de Rouen, aurait dit-on, refusé le siège archiépiscopal parisien. Ce qui suppose qu'il lui ait été proposé. Que la chose soit avérée ou pas, qu'elle passât pour crédible suffit à donner froid dans le dos. Mis en lumière à l'occasion de l'assassinat du Père Hamel, le prélat rendit publique sa conception personnelle du martyre en République, et son soutien sans faille à la communauté musulmane, trahie malgré elle par un furieux sorti de ses rangs.

Donnant ces jours-ci une interview à un périodique rouennais, dont « Riposte Catholique » nous restitue les bonnes feuilles, l'Ordinaire de Rouen nous surprend par une sentence inattendue de la part d'un évêque français : « Qui va leur dire que la FSSPX avait raison, qu'on a été injuste avec eux ? Moi, je le dis ». Le titre accrocheur retenu par Riposte Catholique sollicite un peu vite la déclaration exacte. Remise dans le contexte du paragraphe qui l'inclut, la concession est focalisée sur un point précis : l'adoption de la blouse ou de l'uniforme en milieu scolaire. Cette pratique, désormais en discussion dans l'Education Nationale, est, selon le prélat, l'une des raisons de l'attractivité des établissements de la FSSPX. Non, Mgr Lefebvre n'a pas reçu l'approbation globale de Mgr Lebrun.

Loin de reconnaitre quelque attractivité propre à la FSSPX, que l'on rejoint toujours par méprise, sans parler du tiers de « paumés » (sic), si ce n'est pour la discipline qui manque ailleurs, c'est à l'Education Nationale que s'en prend l'Ordinaire : « la cause du dynamisme que connait la FSSPX, c'est plus du côté de l'Education Nationale qu'il faut la chercher ». Soyons clairs : ce dynamisme est regrettable, et ce mal tient à l'absence de bien là où la République défaille. Les 100 ou 200 fidèles sont un « parvulus grex » à côté de la centaine de milliers de chrétien en Seine Maritime, s'enorgueillit le prélat. Au regard des 1,247 millions d'habitants du département 76, 8% de chrétiens, ce n'est guère brillant. A 2% de pratiquants, on tombe à 25000. La liquidation des 100 (soit 4/1000 des pratiquants diocésains) ou 200 (soit 8/1000 des pratiquants diocésains) constituant l'étiage des fidèles de la FSPPX (qui tous pratiquent leur religion), s'impose-t-elle comme une urgence aux yeux de Mgr Lebrun, lequel affecte de pleurer sur la séparation des frères ?

Hélas, ses frères séparés ont péché, et mortellement. Ils vivent dans la peur, rançon de leur faute, comme l'œil de Caïn dans sa tombe. Car ils n'aiment pas la religion musulmane, dès lors qu'ils en professent une autre, laquelle est censée être celle de Mgr Lebrun. Lequel dévoile dans l'interview mentionnée, sa propre gnose, ouvrant ainsi clairement un gouffre. Une citation longue s'impose pour en mesurer l'abime :

« (…).Mais de fait, nous (les mitres au pouvoir, ndlr) avons une vraie divergence de fond qui porte sur la manière dont nous (tous ? ndlr) sommes sauvés par Dieu. Nous (les mitres au pouvoir, ndlr) sommes d'accord pour dire que Jésus sauve tous les hommes (sans exception ? ndlr), mais eux (FSSPX, ndlr) considèrent qu'ils doivent devenir chrétiens tout de suite (de leur vivant, ndlr). MOI, JE DIS (souligné par le rédacteur) que dans le salut, il faut absolument que la conscience de l'autre soit respectée. C'est un point théologique très compliqué. Je ne peux pas imposer le christianisme par des lois. Nous (les mitres au pouvoir, ndlr) avons renoncé à un Etat confessionnel. Eux (FSSPX, ndlr) non. »

« PERSONNELLEMENT (souligné par le rédacteur), je crois que les musulmans, à leur mort, seront sauvés par le Christ qui leur dira de venir ( ?).Je ne peux pas faire pression sur leur conscience. On (les mitres au pouvoir et la FSSPX) a divergé sur le respect de l'intime conscience. C'est la liberté religieuse. Nous (les mitres au pouvoir, ndlr) avons accepté que la société civile doit (sic) s'organiser de manière pluraliste et permettre à chaque communauté de suivre son chemin (à l'exception de la FSSPX ? ndlr). Ils (FSSPX, ndlr) sont confortés dans leur position par le mauvais comportement de la société civile. Cela les (FSSPX, ndlr) renforce. Je veux le vivre avec eux (FSSPX, ndlr). Je ne veux pas les (FSSPX, ndlr) diaboliser (pour l'instant, ndlr). J'espère dans mon cœur une réconciliation. »

Les catholiques réunis sous l'égide de la FSSPX ne pourront pas dire qu'ils n'auront pas été prévenus. Mgr Néron va les traiter comme ces dérangeants Britannicus d'aujourd'hui : « j'embrasse mon rival, mais c'est pour l'étouffer ». En réalité, ce n'est pas dans son cœur mais dans ses rêves que l'Ordinaire de Rouen entend gagner des fidèles bien formés à sa propre chimère, si tant est que la République n'accroisse l'argumentaire de l'ennemi par son travail de sappe dé-civilisateur autant que déchristianisant. Un seul et même travail, du reste. Quelle réconciliation espérer sinon autour de l'Enseignement Constant, que Mgr Lebrun a déserté, et qu'il lui revient de redécouvrir ? Mgr, it's up to you !

Lorsque Mgr Lebrun fait sien les accents lyriques du vicaire savoyard de Rousseau, qu'il insulte le Sauveur en le parodiant sur le mode « il vous a été dit, mais moi je vous dis », qu'il se lamente des coups de Jarnac républicains, ne voit-on pas que le prélat, outre son ignorance de ce que fut la Chrétienté historique et ses pratiques, manifeste publiquement qu'il a changé de religion ? Lorsque le séminariste Renan a dévoilé son incrédulité à Mgr Dupanloup, Supérieur du Séminaire de Saint Nicolas du Chardonnet, ce dernier lui a intimé l'interdiction de communier. Si Mgr Lebrun n'a pas la même conception que Notre Seigneur quant aux modalités qu'Il a fixé pour le Salut des âmes, il serait loyal de sa part de démissionner.

Mais c'est alors la République qui pourrait regretter ce bel ouvrier de la dénaturation de sa mission d'évêque, tout au service républicain, non moins sacré semble-t-il, de déconsidération du zèle vraiment catholique sur sa zone d'influence. Mgr Lebrun n'a pas compris que la fin de la Chrétienté dévoile l'inconsistance propre d'un projet collectif républicain en France qui n'ait comme préalable une déchristianisation massive. Laquelle entraine la société civile dans une dislocation imparable dont la République feint d'être accablée, alors qu'elle en est intimement comblée. Soit, il n'est pas politologue, mais il est évêque, et il n'a pas non plus compris le Mystère Pascal. Tragique, on vous dit !

Ayant dévoilé sa lubie personnelle, Mgr Lebrun entend-il suggérer que sa conviction est celle de la CEF toute entière ? Bien au-delà du respect dû aux pouvoirs en place, l'allégeance républicaine des évêques français devient conflictuelle. Si la société civile savonne la planche aux diocèses de telle façon que les citoyens dépités aillent chercher refuge dans les officines simultanément d'hier et d'en face, le retour du refoulé devient particulièrement amer chez les mitres au pouvoir.


Dr. Philippe de Labriolle

Psychiatre Honoraire des Hôpitaux

A la une

S'abonner à notre lettre hebdomadaire

Si vous désirez recevoir régulièrement et gratuitement la lettre de Paix Liturgique, inscrivez-vous.
S'ABONNER

Paix Liturgique
dans le monde

Parce que la réconciliation liturgique est un enjeu pour toute l'Église universelle, nous publions tous les mois des lettres dans les principales langues du monde catholique. Découvrez et faites connaître nos éditions étrangères.

Télécharger notre application

Soutenir Paix Liturgique