Notre lettre 1317 publiée le 16 décembre 2025

« MARTHE ROBIN »

DISPUTE À MEDJUGORGE

LE TITRE DE LA PLUS GRANDE ARNAQUE " MYSTIQUE"

DU 20ÈME SIECLE

UNE CHRONIQUE
DE PHILIPPE DE LABRIOLLE

 Marthe Robin, oû en est-on ? La Nef, dans sa livraison de Décembre 2025, s'adosse à un nouvel essai biographique récemment paru, et signé par François de Muizon. Ce théologien avait déjà fait le point sous le titre « Marthe Robin, le mystère décrypté », en 2011. Il s'agit, dans le nouvel opus, de sauver Marthe et le crédit qu'on lui reconnaît de moins en moins, par un clivage radical entre l'histoire sainte d'une paysanne singulière et l'histoire glauque des influenceurs cléricaux se réclamant d'elle. En 2011, Muizon n'aborde aucunement la question des turpitudes du Père Marie-Dominique Philippe (1912/2006), mort sous la vénération générale. Le fondateur de la Communauté Saint Jean, avec l'aval de Marthe, laquelle tenait lieu d'épiscopat pour ce discernement, n'est devenu suspect que lorsque des langues se délièrent, progressivement, autour de 2011, non sans révolte d'une fraction de ses frères prêtres et disciples, scandalisés du sort infligé au vieux Maître. Las, la Roche Tarpéienne fut à nouveau bien près du Capitole. L'enquête diligentée par la Communauté Saint Jean à partir de 2019, et dont les travaux ont été rendus publics en 2023 sous le titre « Comprendre et Guérir », fait partie de la grande lessive dont les travaux de la CIASE ont légitimé le principe. De cette transparence, la vertu n'est pas inique à priori. Mais c'est la vaste incurie épiscopale de l'après-concile Vatican II qui est ainsi dévoilée, sans autre coulpe que celle qui fut battue, à charge, sur des disparus.

Marthe Robin, décédée en 1981, a réussi à échapper à toute observation médicale en milieu propice. Le Pr Dechaume en 1942 l'avait préconisée ; Le psychiatre Assailly en a fait la demande à Marthe en 1951, essuyant un refus frontal, méconnu de « La Nef »; enfin, Mgr Marchand, évêque de Gap, faisant preuve d'autorité, avait fixé la date d'une telle observation, en clinique, durant la semaine sainte 1981. Marthe est décédée en février, non pas « en odeur de sainteté » comme énoncé deux fois dans « La Nef », mais dans une infecte odeur de méléna. Tel est le nom clinique du sang digéré éliminé par l'anus, dont l'odeur est pestilentielle. Désolé pour l'incommodation... On le sait désormais, Marthe Robin fut très mal entourée et le premier cercle des fondateurs est accablant, démasqué depuis. Dissocier la voyante de ses admirateurs intéressés et peu scrupuleux, est ce pour autant la disculper, si elle sondait réellement les consciences sans démasquer les malfaisants? A contrario, si la voyante ne voyait rien, pas plus qu'elle n'a pressenti l'accablement de son frère, vivant à la ferme Robin comme elle, et se suicidant en 1953, l'hagiographie s'effondre, au profit du roman. En 2011, Muizon ne décrypte aucun mystère, nonobstant le titre alléchant de son livre, mais il développe l'action sournoise du Père Finet. Marthe ayant affirmé au prêtre lyonnais que le Christ en personne exigeait sa présence à ses côtés, et obtenu la bonne fin de cette requête céleste, était elle captive d'en Haut, jusqu'à l'aveuglement en bas ? Les fidèles de Marthe Robin la préfèrent elle en pseudo-paralytique, usagère de chaussons, ou en pseudo-voyante, payant autrui de mots et vaticinant sans lumière ? Quoiqu'il en soit, l'article de « La Nef » note le préjudice le plus objectivable : « Ni l'inédie ni les signes de stigmatisation ne pourront être scientifiquement constatés ». Bien vu ! Fermez le ban ! En 2025, le théologien d'Angers n'apporte aucun élément biographique nouveau, et le lecteur attentif mandaté par « La Nef » esquisse un repli prudentiel, qu'il conseille à tous, en l'absence de réponse de Rome. Reste l'héroïcité des vertus, et le titre de Vénérable, exposé lui-même à une aporie, une impasse logique. S'il est patent que la vie de Marthe est un calvaire, au sens trivial du terme, oû est l'héroïsme, à passer sa vie durant pour une héroïne, à la charge d'autrui et n'ayant qu'à commander pour obtenir. N'a-t-elle pas déjà sa récompense ?

C'est à une véritable fuite en avant que se livrent les affidés du lobby Marthe. Isoler Marthe, pour la protéger d'une opprobre qui a frappé ses amis ou alliés pseudo-rénovateurs de l'Église, trahis par leur hybris, c'est immanquablement la ramener aux limites de sa condition ingrate, faute de soins, offerts mais dédaignés, faute encore et surtout de cette compassion dès les tourments de l'adolescence, en cette fin d'année 1918....sur laquelle Madame le Docteur Chevassus refuse de faire l'impasse. Les appels à la prudence, ainsi qu'à la charité, ne sauraient occulter les multiples offenses faites à l'esprit de vérité, tout au long de la vie de Marthe Robin. Il ne faut pas que Rome conserve la qualification de Vénérable lorsque rien n'est sûr, ni de l'inspiration mystique, ni du diagnostic clinique, ni de l'inédie. A ce jour, la saga « Marthe Robin » dispute à Medjugorge le titre de plus grande arnaque « mystique » du 20° siècle.


Philippe de Labriolle

Psychiatre Honoraire des Hôpitaux

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